L'Affaire Blaireau
EAN13
9789999998475
Éditeur
NumiLog
Langue
français
Fiches UNIMARC
S'identifier

L'Affaire Blaireau

NumiLog

Livre numérique

  • Aide EAN13 : 9789999998475
    • Fichier EPUB, avec DRM Adobe
      Impression

      Impossible

      Copier/Coller

      Impossible

      Partage

      6 appareils

      Lecture audio

      Impossible

    2.00
CHAPITRE V

_

Dans lequel on va faire connaissance du sympathique mais infortuné Blaireau,
pâle Victime d'un bourgmestre en délire_.

Qu'était-ce au juste que Blaireau ?

Personne n'aurait su exactement le dire. C'était Blaireau, et voilà tout.

Ni propriétaire, ni fermier, ni journalier, ni commerçant, ni industriel, ni
fonctionnaire de l'État, ni rien du tout, Blaireau appartenait à cette classe
d'êtres difficilement catégorisables et qui semblent, d'ailleurs, ne pas tenir
enthousiastement à occuper une case déterminée sur le damier social.

Très philosophe, très madré, ce bohème rural était, par la population,
soupçonné d'équilibrer son budget (!) grâce à des virements portant de
préférence sur les végétaux d'autrui et les lièvres circonvoisins, le tout
mijoté sur du bois mort (ou vif), discrètement emprunté aux forêts d'alentour.

Blaireau détenait sans doute un sac fertile en malices, car jamais, ni
gendarmes, ni gardes ne réussirent à le prendre en flagrant délit, ni même à
lui dresser le plus inoffensif procès-verbal.

Vingt fois, accusé de méfaits divers, il vit sa rustique cabane, sa literie
modeste, son mobilier champêtre en proie à des perquisitions judiciaires et
bousculatoires.

Les gendarmes ne trouvaient rien que, parfois, un lapin d'origine éminemment
douteuse ou des perdreaux de même provenance.

– D'où vient ce lapin ? questionnait le brigadier.

– Je l'ai acheté au marché.

– À qui ?

– Je ne connais pas son nom, à c'te femme... Une grosse blonde qui a des
taches de rousseur plein la figure.

– Et ces deux perdreaux ?

– Au marché aussi.

– À la grosse blonde ?

– Non, au contraire, à une petite brune frisée.

– Vous seriez probablement bien embarrassé de prouver vos _dires_.

– Ah ! dame, oui, mais la prochaine fois, je leur demanderai une facture
acquittée, à mes marchandes.

Et devant la stupeur déconcertée du naïf pandore, Blaireau ajoutait
froidement, mais sur le ton de la plus parfaite courtoisie :

– Oui, brigadier, une facture acquittée, et j'y ferai mettre un timbre de dix
centimes si mon acquisition atteint ou dépasse dix francs.

Que répondre à un tel goguenard ? Furieuse de se voir ainsi jouée, la
maréchaussée se retirait, non sans avoir décoché un dernier coup de pied
vengeur sur quelque meuble.

Les gendarmes n'étaient pas éloignés d'une dizaine de pas que Blaireau les
hélait :

– Messieurs ! Un mot, s'il vous plaît ?

Leur désignant alors son pauvre intérieur tout sens dessus dessous :

– Et l'on vous appelle, souriait-il ironique, les représentants de l'ordre !

Blaireau avait toujours le mot pour rire, plaisant apanage de tout philosophe
vraiment pratique.

Malheureusement la philosophie de Blaireau ne l'empêchait pas d'être en butte
à deux haines farouches.

La haine du maire de Montpaillard, M. Dubenoît, qui se refusait à admettre,
d'abord, qu'une honnête cité comme la sienne pût donner asile à un personnage
aussi peu régulier ; ensuite et par reflet l'hostilité du sieur Parju (Ovide),
déjà nommé.
S'identifier pour envoyer des commentaires.